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Conduire l'avenir

Les véhicules électriques sont-ils la solution aux problèmes de sécurité routière ?

À la pointe de la technologie, on pourrait croire qu’une voiture électrique permet de se prémunir de tout accident. La réalité est plus nuancée – conduire une Tesla ne vous rendra pas invincible.

sécurité routière

L’anti-blocage des roues, breveté par Bosch en 1936. La ceinture de sécurité, rendue obligatoire en 1972. Le correcteur électronique de trajectoire, lui aussi trouvaille de Bosch en 1995. Les airbags, le freinage automatique, la détection de piétons et cyclistes, ou même  d’angle-morts… La liste pourrait durer indéfiniment. Plus que des inventions entrées dans notre quotidien automobile, ces dispositifs de sécurité ont permis d’infléchir de façon exponentielle le nombre d’accidents corporels. Passant de 16 545 en 1972, annus horribilis, à 2944 morts sur les routes françaises en 2021. Il est donc légitime de penser que la démocratisation progressive des voitures personnelles électriques, considérées comme à la pointe de la technologie automobile – et donc, à la pointe de la sécurité -, permettra d’améliorer ce résultat. Mais est-ce vraiment le cas ?

Des voitures réfléchies pour la sûreté.

De prime abord, il est en effet tentant de reconnaître que les véhicules électriques sont effectivement plus sécurisés, plus sécurisants aussi – tant pour le conducteur que les autres usagers de la route. Il suffit de regarder la liste des équipements d’une Tesla Model 3, récompensée d’un 5/5 au test de référence EuroNCAP en 2019. Bien évidemment, on retrouve du classique. Airbags, assistance au freinage d’urgence, antipatinage, franchissement de ligne, ABS, limiteur de vitesse… Mais ce n’est pas tout. L’entièreté de la voiture semble avoir été réfléchie pour la sûreté. De grands espaces de déformation, composés de mousse en polypropylène expansé, se trouvent à l’avant comme à l’arrière afin d’absorber les chocs. Le bloc batterie, positionné comme un plancher, permet à la fois d’éviter que le moteur termine sa course dans les passagers en cas d’accident, mais aussi que le véhicule ne se retourne. La structure de l’habitacle, renforcée, ainsi qu’une structure brevetée, permettent de protéger les occupants comme la batterie. Cette dernière se déconnecte d’ailleurs en quelques millisecondes de façon totalement automatique si les capteurs dont est bardée l’automobile perçoivent quelque chose d’anormal. Enfin, avec les progrès de l’automatisation du pilotage, il est possible d’imaginer un futur où les VE en circulation communiqueront entre eux, s’échangeant en temps réel des informations visant à rendre la route encore plus sûre. Cela signifie-t-il pour autant la fin de la sécurité routière ?

Plus sécurisé, mais pas invincible non plus.

Selon une étude menée par l’assureur AXA et dévoilée en 2022, les conducteurs de véhicules électriques seraient impliqués dans 50% d’accidents supplémentaires par rapport à leurs homologues thermiques. Une raison qui peut se comprendre par le prisme de plusieurs facteurs. En premier lieu, l’habitude. En effet, les VE n’ont pas les mêmes performances que les véhicules carburant à l’essence ou au diesel. Des différences qui se ressentent particulièrement lors des accélérations, bien plus poussives et sensibles, le couple du moteur étant délivré de manière instantanée. Un overtapping, ou accélération involontaire et incontrôlée, comme une pédale un peu trop pressée, peut vite vous envoyer dans le décor.  Rien d’impossible à corriger, nous en conviendrons.

Un peu de pratique histoire de s’habituer au véhicule et le tour est joué ? Pas si sûr. Il ne faut pas oublier que les véhicules électriques, souvent plus lourds et plus résistants que les voitures à moteur thermique, restent minoritaires dans le parc français. Une Tesla Model 3 peut peser jusqu’à 1800 kilogrammes, là où la Peugeot 206+, avec une estimation d’1 380 000 exemplaires en circulation en 2017, ne dépasse pas la tonne. Un choc entre ces deux extrêmes occasionnerait forcément des dégâts considérables sur la petite citadine française – avec les conséquences qu’on imagine pour ses occupants. La pullulation des aides à la conduite ne risque-t-elle pas non plus de baisser la vigilance des conducteurs, en laissant penser qu’il n’a pas à être pleinement concentré car tel dispositif lui sauverait la mise ? Les véhicules électriques sont déjà réputés plus dangereux pour les piétons et cyclistes, la faute à une circulation presque silencieuse à faible vitesse – depuis 2019, une législation les oblige d’ailleurs à émettre au moins 56 décibels à 20 km/h.

Certains des dangers d’une voiture électriques sont, quant à eux, inhérents aux structures à batteries. Comme nous l’avons vu dans un article sur la nécessaire formation des garagistes, cette source d’énergie n’est pas sans risques, et nécessite des précautions supplémentaires. Il ne faudrait pas qu’un usager ne décide de vouloir assurer sa maintenance lui-même, sans équipement de protection, et s’électrise. Attention aussi au lavage, on n’est jamais trop prudent. Enfin, l’informatique, prépondérante dans le fonctionnement d’une telle automobile, n’est pas exempte de défauts. Les défauts logiciels sont fréquents, en témoignent les expériences de Tesla (300 000 véhicules rappelés pour cause de déconnexion des feux arrière) et BMW (14 000 i4, i7 et iX rappelées suite à des bugs de batterie). Même si les véhicules électriques apparaissent comme la meilleure solution actuelle dans le cadre de la transition écologique du parc automobile français, il ne faut pas oublier de les conduire en toute sécurité.