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L’hydrogène, sauveur du transport routier vert ?

Poids-lourd de la pollution mais maillon essentiel de notre économie globalisée, le transport routier doit lui aussi se plier à la transition écologique. Et parmi la diversité de motorisations vertes existantes, l’une d’elles cristallise de nombreux espoirs autour d’elle : l’hydrogène. Comment favoriser son développement en France ? Quelques éléments de réponse.

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Ils ne représentent que 2% du parc automobile français et sont pourtant responsables de 22% de ses émissions de gaz à effet de serre (Source : CITEPA, inventaire format Secten 2020) : les poids-lourds, vecteur essentiel de l’économie, sont aussi un des enjeux majeurs de la transition écologique. Un camion de 38 tonnes consomme entre 30 et 40 litres aux cent kilomètres, avec près de 600 litres de carburant dans son réservoir. Diminuer le poids des transports dans les émissions de CO2 passe par réduire l’impact des poids lourds.

Les poids lourds se prêtent mal à la mobilité électrique

Pourtant, les moteurs à propulsion électrique ne sont pas les plus adaptés aux contraintes qui régissent le transport poids-lourds. L’autonomie, grevée par le poids du porteur et de la cargaison, ne suffit pas à parcourir les centaines de kilomètres nécessaires. Le poids des batteries accentue le problème :  qui dit plus de batterie pour augmenter l’autonomie dit aussi plus de poids, et donc moins d’autonomie.

Le prix est un autre point de blocage, les camions électriques, peu nombreux dans l’offre des constructeurs, coûtent souvent trois à cinq fois plus chers que leurs homologues thermiques. Certaines structures ont pourtant fait le choix de l’électrique, comme le transporteur allemand DPD, dont une partie de la flotte fut équipée en 2020 de camions e-truck Logistics 18E sur base Volvo Trucks. Ces derniers, fruits du travail du constructeur suisse Designwerk Futuricum, sont équipés d’une batterie de 680 kWh, permettant une autonomie maximale de 760 km. Mais ils ne sont affectés qu’à des dessertes régionales, servant majoritairement à délivrer des colis, et non pas à porter des conteneurs.

L’hydrogène, juste la bonne échelle ?

L’hydrogène n’est pas une solution miracle pour concevoir des véhicules personnels “verts”. Mais envisager des poids-lourds équipés de cette motorisation reste très intéressant. C’est le choix fait par Hyundai, Mercedes, Volvo ou bien encore Nikola.  Le poids d’une pile à combustible et d’un réservoir d’hydrogène n’étant pas beaucoup plus élevé que celui d’un réservoir à combustible fossile, un réservoir de 80 kg d’hydrogène gazeux, comprimé à 700 bars, offre une autonomie de 1000 kilomètres ainsi qu’un remplissage de cinq minutes à la pompe – là où une batterie se chargerait en plusieurs heures.

Un argument de taille, qui fait d’ailleurs de la motorisation à l’hydrogène un des objectifs définis par la Stratégie nationale pour le développement de l’hydrogène décarboné en France défendue par Barbara Pompili, alors ministre de la Transition écologique et Bruno Le Maire, alors ministre de l’Economie, de Finances et de la Relance, en 2020. Son troisième point, sur une liste de cinq consultables sur écologie.gouv.fr, s’intitule “Développer une offre de mobilité lourde à l’hydrogène. Un investissement de 7 milliards d’euros sera réalisé par le gouvernement d’ici 2030, dont 2 milliards promis par l’intermédiaire du Plan de Relance prévu après la crise du Covid. Mais pour atteindre l’objectif de l’Union Européenne d’atteindre 100 000 camions roulant à l’hydrogène en circulation en 2030 – soit 17% du parc -, avec 1 500 stations réparties à travers les routes Européennes, il va être nécessaire de donner un coup de pouce à la filière – et notamment aux acteurs du transport routier.

Au-delà de la viabilité technique, l’indispensable soutien à l’investissement dans les poids lourds à hydrogène

En premier lieu, il faut favoriser l’achat de véhicules à hydrogène, et notamment par des subventions. Dès le 15 décembre 2020,  le gouvernement annonce la mise en place en 2021 d’un bonus de 50 000 euros pour l’achat ou la location longue durée d’un camion électrique ou hydrogène. Pourtant, là où le camion électrique bénéficie en plus d’un bonus écologique de 50 000 euros, rien pour le camion à hydrogène, alors qu’il est tout autant écologique. Harmoniser ces aides permettrait aux entreprises dont l’activité nécessite impérativement d’être équipé de véhicules poids-lourds de faire le choix de l’hydrogène – et de bénéficier de tous les avantages inhérents à cette motorisation. Non négligeable, un camion comme ceux de Hyzon Motors valant aux alentours de 450 000 euros.

Acheter un camion à hydrogène s’accompagne aussi de la nécessité de bénéficier d’une station de recharge à proximité. Là-aussi, il pourra être nécessaire d’offrir différentes subventions pour réduire au maximum les coûts pris en charge par l’entreprise cliente vis-à-vis de l’installation de stations de production et de distribution d’hydrogène. Des offres telles que celle de la région Bourgogne Franche Comté, prenant en charge “60% (des coûts)  pour une petite entreprise, 50 % pour une moyenne et 40% pour une grande entreprise” pouvant par exemple être développées tout autour du territoire français. Une mission qui devrait être prise en charge par la Banque des Territoires, elle qui “soutient le développement des mobilités durables dans le cadre de la loi de transition énergétique pour une croissance verte.” De quoi participer à atteindre l’objectif Européen vis à vis de cette motorisation poids-lourds : le 14 décembre 2021, la commissaire européenne aux Transports, Adina Vălean, annonçait qu’en 2030, 17% des camions rouleront à l’hydrogène sur les routes Européennes.